Ils ont déchiré sa robe,comme on bat un drapeau, par une lourde tempête.
Ils ont bleui sa peau marbrée de rouge. Secouée bousculée basculée
elle quitte l’équilibre,
tente de s’envoler
mais sa cheville est entravée.

Ils violent sa bouche d’orties et de sarments broyés;
ils lui fourrent la tête dans un sac mouillé de toile.
La recouvre de terre.

Roulée par dessous les éclats de charbon, à étouffer sous la poussière noire et scintillante qui plaque son expire inspir, elle arque et brandit ses bras pour libérer l’espace.
Elle ne peut respirer qu’à peine sous le masque ferme d’une grosse main brouillée de sang.
On a tué sa garde.
Dérobé son honneur,
avili son orgueil,
brouillé sa mémoire.

Elle gît; frêle.
Au grand profond des ténèbres coagulantes,
des noirceurs maléfiques.
Sous l’arche des vieux arbres
trônent
les chefs de guerre.

Par dessus leurs têtes
planent trois soleils noirs
en rotation lente.

De gigantesques libellules
psalmodient des prières
impies.

L’atmosphère s’enlaidit d’un bruit froissé d’ailes
et de paupières.

Des lacs s’épanchent...
des larmes cauchemardesques de cristal noir
ruissellent
aux joues des collines.

Ils ont placé leurs larges pouces
en spatule.
Lui enserrent la tête.
Appuient sur les deux pétales
de soie fibrilles
qui couvrent les prunelles
translucides
de ses yeux où voyage
Le temps.

- Globes célestes-
Passerelles
vers des mondes parallèles
aux respirations haletantes...
Ses yeux papillonnent et se posent
un instant
pour se lisser les ailes.
Et s’envolent
à tire d’elle.

Elle s’élève dans les airs
de toute son âme ,
par delà tout obstacle,
tout enfermement.

La torture n’ est plus rien.
Elle n’a pas choisi ses blessures.
On ne reconnaît jamais le visage de l’oppresseur.
On ne s’y attend d’ailleurs jamais.
Sinon,
on léviterait au plus haut.
Elle ne les a pas vu s’approcher.
Ils ne sauront jamais qu’elle
Seule
Était
Du creux de ses passions

Dépositaire de l’unique pierre
De la liberté.

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